Combien de temps allez-vous continuer à importer du soja du Brésil ?
Les agriculteurs allemands nourrissent leurs animaux avec du soja du Brésil. Une forêt tropicale massive est abattue pour la culture du soja. Cela pourrait aussi être différent.
Les plantations de soja au Brésil s'enfoncent de plus en plus dans la forêt tropicale
Il y a plus de trois décennies, l'agriculteur Wilhelm Eckei a pris une décision, à cause de laquelle tous ses voisins et collègues l'ont déclaré complètement fou. Quelle époque : nous sommes en 1989, le mur de Berlin est toujours debout et les Verts ne sont au Bundestag que depuis six ans.
Eckei s'apprête à reprendre l'entreprise familiale du Sauerland de son père et rêve d'une autre agriculture. Il veut bouleverser complètement la ferme : plus de durabilité, plus d'attention au bien-être des animaux, pas d'antibiotiques, pas d'aliments provenant de l'étranger. Eckei devient un pionnier, est le premier agriculteur en Allemagne à adopter le programme dit Neuland pour un élevage respectueux des animaux. Et donc, si vous voulez, le premier agriculteur biologique de ce pays.
"La population est prête à puiser plus profondément dans ses poches pour d'autres agricultures aussi" - Wilhelm Eckei
« C'est à ce moment-là qu'ont commencé les critiques sur le maintien des animaux dans les écuries, les vaches et les porcs ne voyaient même pas le jour à l'époque, et nous voulions prendre une autre voie que celle vers de plus en plus de croissance. C'est bien que nous ne l'ayons pas fait. avoir tous les potins dans le village à l'époque, nous avons certainement été pas mal éreintés », dit en riant l'homme de 59 ans.
LES EXPLOITANTS DE SUPERMARCHÉS REPENSENT DÉSORMAIS EUX AUSSI
Aujourd'hui, 280 porcs et 35 bovins s'ébattent dans sa ferme, entretenus de manière adaptée à l'espèce avec beaucoup d'espace pour courir, les porcs tâtonnent sur la paille, les vaches paissent dans une prairie verdoyante. 1000 poules pondent chaque jour leurs œufs en vente directe, plus 800 poulets de chair, qui, comme tous les animaux, sont abattus par un boucher régional.
"Aucune des parties n'a réussi à nous protéger de ce marché mondial ruineux" - Wilhelm Eckei
Eckei, d'abord ridiculisé comme exotique, a initié un mouvement écologique que même les supermarchés discount ne refusent plus de faire maintenant. « Aldi et Lidl pensent également que les gens veulent quelque chose qui soit produit de manière alternative dans leur assiette. » Après tout, un agriculteur sur huit en Allemagne est passé à l'agriculture biologique aujourd'hui.
L'AGRICULTEUR BIOLOGIQUE ECKEI PRODUIT LUI-MÊME DES ALIMENTS PROTÉINÉS
Cette vague verte passe également par la fourniture aux animaux d'aliments produits localement. Et pas avec le soja du Brésil, pour la culture duquel une forêt tropicale massive est défrichée. Wilhelm Eckei explique fièrement la recette de son mélange de protéines : « Haricots, pois, céréales et pommes de terre. Et tourteau de colza. Nous pressons le colza pour l'huile et les restes entrent dans l'alimentation du bétail.
L'agriculture conventionnelle, en revanche, continue de dépendre du soja du Brésil, l'alimentation animale importée est tout simplement moins chère. "Le soja d'Amérique du Sud est un très bon aliment, car le fermier peut élever ses porcs à bon marché avec peu d'argent." La production en interne coûte du temps et de l'argent à Eckei chaque jour, et les coûts supplémentaires sont répercutés sur le consommateur.
LES PORCS ALLEMANDS MANGENT DU SOJA BRÉSILIEN
L'agriculteur biologique, qui a également employé un ouvrier agricole syrien dans sa ferme après la crise des réfugiés en 2015, a une chose avant tout : il ne veut pas qu'un seul arbre soit abattu et que le changement climatique soit accéléré en gardant des animaux. Il explique aux classes d'école qui visitent sa ferme que l'Allemagne prive les agriculteurs d'Amérique du Sud de leurs moyens de subsistance à cause de l'alimentation de ses animaux, car ils sont expropriés et expulsés par les grandes entreprises.
"Pour la plupart des agriculteurs en Allemagne, au Brésil et les problèmes auxquels sont confrontés les gens là-bas sont loin", explique Eckei, qui a été impliqué dans le "Groupe de travail sur l'agriculture rurale" pendant des décennies. Le lobby pour les petites et moyennes entreprises et plus de compatibilité environnementale, un contrepoids à la puissante et conservatrice association des agriculteurs allemands. "Les zones de culture du soja que vous n'avez pas ici sont simplement utilisées dans d'autres parties du monde. Cela doit cesser, car la population ici veut un autre type d'agriculture."
EXIGENCES SELON LE DROIT STRICT DE LA CHAÎNE D'APPROVISIONNEMENT DE L'UE
C'est ce que veut aussi Anton Hofreiter, au moins depuis 2015, lorsqu'il a vu de ses propres yeux les gigantesques champs de soja apparemment sans fin du Brésil, qui s'étendent jusqu'à l'horizon. Le député vert du Bundestag est le politicien allemand qui est le plus véhémente en faveur de la fin du modèle commercial agricole actuel avec l'Amérique du Sud mieux aujourd'hui que demain.
« Nous ne voulons plus importer de soja de régions telles que le Brésil, qui défrichent les forêts tropicales pour la culture. Nous demandons donc une législation européenne contraignante pour des chaînes d'approvisionnement exemptes de violations des droits de l'homme, de déforestation et d'autres crimes environnementaux », a déclaré Hofreiter, " et il est important que nous réduisions notre dépendance vis-à-vis des importations d'aliments pour animaux, par exemple en cultivant des cultures fourragères alternatives en Europe. "
LE SOJA PRODUIT ILLÉGALEMENT SE RETROUVE DANS LES MANGEOIRES ALLEMANDES
Actuellement, seulement cinq pour cent des agriculteurs européens obtiennent du soja de sources locales, comme Wilhelm Eckei. L'importation de soja du Brésil, en revanche, atteint de nouveaux records d'année en année. A cet effet, deux millions de tonnes de soja par an, soit un cinquième des importations dans l'UE, sont cultivées sur des surfaces défrichées illégalement.
"Nous avons un problème d'espace en Allemagne, nous devons donc importer beaucoup de soja" - Anton Hofreiter
Après sa visite au Brésil, Hofreiter a écrit un livre sur "l'usine de viande en Allemagne", comment l'élevage industriel détruit les moyens de subsistance des gens. Les images d'Amérique du Sud ne peuvent pas sortir de sa tête à ce jour, les produits agricoles provenant des zones forestières défrichées d'Amazonie doivent être interdits d'importation dès que possible.
LE MODÈLE D'ENGAGEMENT VOLONTAIRE A ÉCHOUÉ ?
Deutsche Umwelthilfe se plaint qu'aucune entreprise, que ce soit Aldi, Edeka ou Kaufland, ne puisse retracer tout le soja utilisé dans la chaîne d'approvisionnement jusqu'à la région de culture. Une loi forte sur la chaîne d'approvisionnement et une loi contre la déforestation importée par l'UE sont nécessaires de toute urgence. Mais la ministre de l'Agriculture Julia Klöckner de la CDU préfère s'appuyer sur des engagements volontaires plutôt que sur des exigences légales.
La ministre de l'Agriculture Julia Klöckner est vivement critiquée par les groupes écologistes à cause de la question du soja
« Si les politiques de l'Allemagne et de l'Union européenne continuent comme ça, la destruction des forêts tropicales va continuer à augmenter. L'Europe est le plus grand marché pour le soja au monde. Donc si nous changeons notre politique, nous aurons au moins la chance de mettre pression sur le président brésilien Bolsonaro et ainsi faire la différence », explique Anton Hofreiter.
Un coup d'œil au Brésil montre que rien de tout cela ne sera aussi facile.
AUTREFOIS RÉGION INHOSPITALIÈRE, AUJOURD'HUI MOTEUR ÉCONOMIQUE : L'ÉTAT DU MATO GROSSO
Le Mato Grosso, l'État du Midwest, se traduit par « forêt dense ». Lorsque Wilhelm Eckei a décidé en 1989 de se concentrer sur l'agriculture biologique, la région frontalière avec la Bolivie était encore inaccessible et économiquement non rentable. Aujourd'hui, la province, avec une superficie deux fois plus grande que l'Espagne, est le plus grand producteur de soja du pays et le moteur économique du Brésil. "L'or vert" est ce qu'ils appellent la récolte ici. Le prix : il ne reste de la forêt dense que le nom, il disparaît à une vitesse record.
Les grands entrepreneurs sont surnommés "Soy Kings" et ils se frottent les mains en pensant à l'année prochaine. Des armées d'ouvriers sont sur le point de préparer le terrain, en octobre les plantes commenceront à pousser. 136 millions de tonnes de céréales doivent être récoltées au Brésil en 2022, prédit la société d'État pour l'approvisionnement, la Conab. Trois fois plus que la récolte de céréales dans toute l'Allemagne.
Si vous conduisez le long de l'autoroute BR-163 à travers le Mato Grosso, vous verrez des kilomètres de zones de culture de soja, qui rongent même les zones urbaines. Les bâtiments les plus hauts sont les silos massifs dans lesquels le soja est stocké. En même temps, vous tombez sur un mur de silence : le représentant de l'association des producteurs de soja Aprosoja ne veut pas donner d'interview sur le sujet à Deutsche Welle. Les responsables réagissent de plus en plus agacés à l'accusation de destruction de l'environnement. Pas étonnant, car ils ont besoin d'explications : selon les statistiques, 88 % des défrichements sont illégaux.
LES PETITS AGRICULTEURS N'ONT AUCUNE CHANCE CONTRE LE PUISSANT LOBBY AGRICOLE DU SOJA ET LE PRÉSIDENT
Beaucoup de gens profitent du boom du soja dans le Mato Grosso, les agriculteurs comme Marciano Manoel da Silva sont en minorité. Da Silva essaie de suivre la voie de Wilhelm Eckei au Brésil, pour promouvoir l'agriculture écologique en Amérique du Sud, une tâche colossale. Il cultive des légumes dans la petite ville de Cláudia sans utiliser de pesticides et déchante complètement : "Nous avions l'espoir de pouvoir produire de manière saine et durable, surtout ici en Amazonie."
Petits agriculteurs contre le puissant lobby agricole du Brésil : Marciano Manoel da Silva au Mato Grosso
La pression sur les agriculteurs comme da Silva et ses collègues du mouvement social « Mouvement des travailleurs sans terre », ou « MST » en abrégé, augmente ; c'est un peu comme le combat entre David et Goliath. "Nous sommes constamment harcelés par la puissante agro-industrie, souvent avec de fausses promesses de louer une ferme et enfin de cultiver du soja comme tout le monde." Car la soif d'"or vert" est énorme, surtout en Chine. Près de la moitié du soja récolté va désormais à l'Empire du Milieu.
Marciano Manoel da Silva peut attendre longtemps le soutien du gouvernement brésilien : après tout, il y a l'homme qui écarte tous les obstacles bureaucratiques à la culture massive du soja, protège les producteurs contre les écologistes et dépense des sommes énormes pour l'infrastructure de Le Mato Grosso pompe comme l'asphaltage de la BR-163 : le président Jair Bolsonaro.
LA CAMPAGNE DE BOLSONARO CONTRE L'ENVIRONNEMENT
"Bolsonaro est un ennemi de la protection de l'environnement, il mène une guerre contre la nature, les peuples autochtones, les écologistes et la science. Il est également étroitement lié à ceux qui défrichent la forêt tropicale. Sous Bolsonaro, il n'y a aucune volonté de citer la surexploitation de la nature. Ceux qui espèrent encore que Bolsonaro se transformerait en écologiste face à la pression internationale sont sur la mauvaise voie », estime Carlos Rittl.
"Des études montrent que la culture et la vente de produits naturels sont plus lucratives que le soja" - Carlos Rittl
La protection de l'environnement dans son pays d'origine est l'œuvre d'une vie du scientifique. Pendant des années, il a travaillé pour des organisations non gouvernementales telles que Greenpeace et WWF ainsi que pour l'observatoire du climat au Brésil. Il y a un an, au milieu de la pandémie de corona, Rittl est venu en Allemagne et fait depuis des recherches à l'Institute for Transformative Sustainability Research de Potsdam. Un nom encombrant, pour le dire plus simplement : un mémorial pour plus de durabilité dans le monde.
L'ACCORD ENTRE L'UE ET LE MERCOSUR AVEC L'OBSTACLE BOLSONARO
Bolsonaro le poursuit également en Allemagne, car Carlos Rittl, avec d'autres scientifiques, a présenté une étude très appréciée : Comment pourrait-on améliorer l'accord sur les questions environnementales, qui a été négocié pendant deux longues décennies et qui est fondamentalement un accord politique depuis juin 2019 ? L'accord commercial entre l'Union européenne et les pays du Mercosur que sont le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay.
Le président brésilien considère l'État du Mato Grosso principalement comme une source de revenus pour la culture du soja
Rittl a envoyé des propositions concrètes pour commercer ensemble sans détruire la forêt tropicale en même temps à tous les politiciens de l'Union européenne et du Parlement européen. Ce n'est que lorsque les 27 pays membres auront accepté l'accord qu'il pourra entrer en vigueur.
L'expert environnemental déclare : « Bolsonaro est le plus grand obstacle à la ratification du traité, même la récession économique ne peut pas compenser cela. À ce jour, l'accord pour le Brésil serait de 11 000 kilomètres carrés de forêt tropicale déboisée par an, et au en même temps l'avantage d'un accord sans produits Taxes et droits d'exportation vers l'UE. »
UN REGARD ENVOÛTANT SUR LES ÉLECTIONS AU BRÉSIL FIN 2022
C'est pourquoi il y a de plus en plus de voix dans l'Union européenne pour laisser rompre l'accord de libre-échange. Après les élections législatives en Allemagne avec une éventuelle participation des Verts, l'accord aurait un autre adversaire de premier plan. Jusqu'à présent, la France en particulier a freiné pour protéger l'agriculture nationale, tandis que l'Espagne, le Portugal et la Suède font pression pour la ratification.
2022, un an après les élections en Allemagne, pourrait être le moment décisif pour l'accord de libre-échange. Ensuite, le traité est passé par tous les organes des 27 États membres de l'UE. Et à l'automne, le président brésilien Bolsonaro se présente à sa réélection. Carlos Rittl, que ce soit au Brésil ou encore en Allemagne, frissonnera vigoureusement : « L'agenda de Bolsonaro est : détruire, puis planter du soja ou créer des pâturages pour le bétail et à la fin faire de l'argent. Cela doit prendre fin au 21e siècle.
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source de rédaction https://www.dw.com/de/wie-lange-noch-weiter-mit-dem-soja-import-aus-brasilien/a-58998048
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